Véhicules électriques : comment adapter votre car policy ?

Véhicules électriques : comment adapter votre car policy ?

Dans cet article, vous trouverez des conseils pratiques pour adapter votre Car Policy aux véhicules électriques, c’est-à-dire comment mettre à jour la politique automobile de votre entreprise afin de répondre aux nouveaux usages et contraintes des véhicules de service et de fonction électriques.

En effet, sous l’effet conjugué des réglementations et des subventions pour verdir le parc automobile français, l’électrification des flottes d’entreprise est en marche.

La Car Policy : politique automobile de l’entreprise

La politique automobile d’une entreprise est un document interne qui prévoit l’ensemble des droits et obligations des salariés bénéficiaires de véhicules mis à disposition par l’entreprise.

L’entreprise est, en effet, susceptible d’attribuer à ses salariés deux types de véhicules : des véhicules de service / de société ou bien des véhicules de fonction.

Les véhicules de service / de société

Sont qualifiés de véhicules de service / de société, ceux dont l’usage est strictement professionnel et circonscrit aux déplacements effectués dans le cadre des heures de travail du salarié.

L’utilisation de ce type de véhicule permet de réaliser des missions professionnelles liées à l’activité de l’entreprise d’un point de vue technique (livraisons) mais également en tant que moyen de transport (assurer des rendez-vous commerciaux).

Ces véhicules sont, en principe, stationnés, après usage, dans les parkings de l’entreprise. Ils ne sont pas rattachés à un salarié en particulier et ne constituent pas un avantage en nature. Il s’agit uniquement d’un outil de travail.

Les véhicules de fonction

Sont qualifiés de véhicules de fonction ceux dont l’usage peut-être :

  • Soit strictement professionnel : pour les déplacements professionnels mais également pour les trajets domicile-travail ;
  • Soit mixte : c’est-à-dire professionnel et personnel.

L’employeur confie ici au salarié un véhicule qu’il peut utiliser pour les déplacements professionnels mais également pour ses déplacements personnels, en dehors du temps de travail.

Les véhicules de fonction sont ainsi considérés comme un avantage en nature accordé par l’entreprise au profit du salarié. Cet avantage en nature est soumis à cotisations sociales et à l’impôt sur le revenu.

Gestion de la flotte d’entreprise

Ces véhicules de service et de fonction, loués ou achetés directement par l’entreprise, constituent sa « flotte automobile » dont elle reste propriétaire ou locataire.

Les salariés attributaires vont les utiliser, les recharger en énergie pour leur consommation professionnelle ou personnelle en ce qui concerne les véhicules de fonction.

Dès lors que l’entreprise gère plus d’une dizaine de véhicules, cette dernière doit contrôler de façon équitable la manière dont ils sont attribués et utilisés. L’objet de la car policy est ainsi de fixer les règles d’attribution et d’utilisation.

Vous électrifiez votre parc automobile ? Adaptez votre politique automobile d’entreprise

L’électrification des flottes automobiles d’entreprise nécessite d’adapter les « car policy » existantes pour plusieurs raisons.

D’une part, ces politiques prévoient rarement l’attribution de véhicules de ce type. Il convient donc de les ajouter à la liste des véhicules éligibles.

D’autre part, les véhicules électriques présentent une spécificité non négligeable : leur mode de recharge. Contrairement aux véhicules thermiques qui exigent que le salarié se rende dans une station-service, les véhicules électriques se rechargent via des bornes de recharge électriques.

Ces points de recharge peuvent être localisées dans les locaux de l’entreprise, sur des réseaux de point de recharge privés, ou bien encore au domicile des salariés.

Les contraintes inhérentes à ce moyen de recharge pose plusieurs problématiques nécessitant une adaptation de la politique automobile des entreprises.

Il implique, à notre avis, l’adoption de nouvelles règlementations permettant de régir le comportement des salariés vis-à-vis de ce nouvel équipement, notamment si l’entreprise en est soit propriétaire ou locataire.

5 éléments clés à faire figurer dans votre car policy pour l’adapter aux véhicules électriques

Votre politique automobile interne d’entreprise devra notamment prévoir :

1. Les règles d’attribution des équipements (véhicules, bornes)

La car policy doit préciser les règles d’attribution des véhicules électriques et de mise à disposition des bornes de recharge.

Elle doit notamment indiquer catégories de véhicules et, le cas échéant, de bornes de recharge au domicile des salariés susceptibles d’être attribuées.

Elles permettent d’autre part, de déterminer quelles catégories (type de poste, classification…) de salariés de l’entreprise sont éligibles à l’attribution d’un véhicule électrique, afin d’éviter tout soupçon de favoritisme ou de discrimination.

2. La formation des salariés bénéficiant de véhicules électriques

Elle doit également organiser les règles relatives aux formations dont bénéficient les salariés éligibles.

Ces formations sont destinées à permettre aux salariés de s’habituer à la conduite de ce nouveau type de véhicule, afin notamment de réduire l’incidence de leur conduite sur l’environnement.

Attention, si votre entreprise dispose directement ou indirectement d’une flotte de plus de 100 véhicules automobiles[1], le code de l’environnement vous oblige à former et sensibiliser vos salariés aux véhicules électriques ou hybrides rechargeables attribués afin de réduire l’incidence de leur conduite sur l’environnement.

Vous devez vous assurer que les conditions pour une utilisation optimale des véhicules hybrides rechargeables en mode électrique sont réunies[2].

Si votre entreprise dispose d’une flotte moins importante, aucune obligation ne vous est imposée mais vous pouvez organiser une formation et une sensibilisation des collaborateurs sur le fondement de l’obligation générale de formation pratique et appropriée à la sécurité des travailleurs embauchés ou changeant de poste de travail ou de technique[3].

Cette solution constitue, selon nous une réelle opportunité de former vos salariés à l’utilisation des nouveaux véhicules de votre entreprise, afin notamment de réduire leur consommation énergétique.

3. Les règles d’utilisation des véhicules et des bornes de recharges

L’attribution au salarié d’un nouveau véhicule propre nécessite de fixer de nouvelles règles d’utilisation.

Tout d’abord, la politique automobile interne de votre entreprise doit prévoir des règles pratiques d’utilisation du véhicule telles que la détermination de la zone géographique dans laquelle le salarié pourra utiliser le véhicule, le nombre de kilomètres autorisés.

Elles sont normalement déjà intégrées dans la car policy pour tous les véhicules mais si ce n’est pas le cas, c’est le moment d’inclure les règles de bonne conduite pour l’utilisation du véhicule telles que les règles de sécurité, de respect du code de la route, de limitation de vitesse.

Enfin, vous devez vous assurer d’inclure dans la car policy les modalités de recharge du véhicule sur le lieu de travail, sur la voie publique ou à domicile, via des remboursement de frais par l’employeur.

En particulier, vous devez strictement encadrer l’attribution d’un badge « entreprise » (équivalent de la « carte essence ») permettant au salarié de recharger son véhicule sur une borne de recharge sans avancer les frais correspondants à cette recharge.

Pensez notamment à y préciser les situations dans lesquelles le salarié peut utiliser le badge, le type de borne de recharge qu’il peut utiliser ainsi que les plages jours et horaires d’utilisation.

4.     Les règles d’entretien du véhicule électrique et, le cas échéant, des bornes de recharge mises à disposition de l’entreprise

Pour les véhicules mis à disposition, votre politique automobile doit fixer les exigences d’entretien et de maintenance dont le salarié est débiteur s’agissant du véhicule électrique et, le cas échéant, de la borne de recharge mise à disposition par l’employeur dans les locaux de l’entreprise ou au domicile du salarié ;

Enfin, vous devez également prévoir les règles applicables en cas de dégradation, dégâts ou défectuosité du véhicule et le cas échéant, des bornes de recharge dans les locaux de l’entreprise ou au domicile du salarié : Qui contacter ? Dans quel délai ? Comportement à adopter etc.

5.    La détermination des responsabilités côté employeur et salarié

Précisez dans votre politique automobile d’entreprise les modalités d’assurance des véhicules confiés et, le cas échéant, l’assurance couvrant les bornes de recharges dans les locaux de l’entreprise ou au domicile du salarié.

Votre car policy doit également établir la responsabilité des parties en cas d’accident et en cas d’amende lorsqu’est impliqué le véhicule ou, le cas échéant, la borne de recharge utilisé(e) par le salarié.

Associer les représentants du personnel à la mise à jour de votre car policy

A notre sens, l’adoption ou l’adaptation d’une politique automobile interne d’entreprise propre à l’électrification des flottes peut difficilement se faire sans impliquer a minima les représentants du personnel.

En effet, la modification de la flotte automobile d’une entreprise, notamment si elle concerne des véhicules de service, pourrait être considérée comme l’introduction d’un nouvel équipement de travail, modifiant les conditions de travail des salariés.

Par ailleurs, si l’entreprise souhaite que les règles d’utilisation contenues dans la politique automobile interne soient opposables à ses salariés sous peine d’encourir des sanctions disciplinaires, Marici Avocats recommande de suivre la même procédure que celle en vigueur pour l’adoption du règlement intérieur[4].

En effet, le Code du travail prévoit que tout document comportant des règles générales et permanentes relatives à la discipline est considéré comme une adjonction au règlement intérieur[5].

La car policy correspond ainsi, selon nous, à cette définition.

Rappel des règles d’adoption d’une modification du règlement intérieur

Pour mémoire, nous vous rappelons les règles de modification de votre règlement intérieur, qui diffèrent suivant que vous ayez mis en place un Comité Social et Economique (CSE) ou non.

Si vous disposez d’un CSE

pour l’adoption de votre règlement intérieur, vous devez assurer :

  • L’information-consultation du CSE ;
  • La communication du règlement intérieur à l’inspection du travail ;
  • L’accomplissement des formalités de publicité prévues par le Code du travail[6]. L’adjonction au règlement intérieur doit être portée à la connaissance des salariés de l’entreprise : affichage au sein des locaux de l’entreprise, publication sur l’intranet de l’entreprise, courrier à destination des salariés ;
  • Le dépôt du règlement intérieur au greffe du conseil de prud’hommes du ressort de l’entreprise ou de l’établissement[7].

Si vous ne disposez pas de CSE

Pour l’adoption de votre règlement intérieur, vous devez assurer : 

  • La communication du règlement intérieur à l’inspection du travail ;
  • L’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité précisées ci-dessus.

D’un point de vue pratique, à notre sens, si le respect de l’ensemble des règles d’adoption d’une adjonction au règlement intérieur est essentiel, c’est surtout sa diffusion au sein de l’entreprise qui est primordiale.

En effet, la mise en place d’une flotte automobile électrique constitue un changement important dans la vie de l’entreprise ainsi que dans l’utilisation d’un véhicule de fonction ou de service par le salarié.

La diffusion et la bonne compréhension de ces nouvelles règles semble donc essentielle au bon déroulement de cette transition des véhicules thermiques vers des véhicules électriques au sein de votre entreprise.

 

Vous avez des questions à nous soumettre ?

Si vous êtes concernés par l’élaboration ou l’adaptation de votre politique automobile interne d’entreprise et souhaitez nous soumettre une question ? Vous pouvez nous écrire et nous vous répondrons dans les meilleurs délais.

 

Elise Mialhe, avocate associée
Céline Audibert, juriste stagiaire en droit social

 

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Références

[1] dont le poids total autorisé en charge est inférieur ou égal à 3,5 tonnes acquièrent ou utilisent, lors du renouvellement annuel de leur parc, des véhicules à faibles émissions
[2] Article L.224-12-1 du Code de l’environnement
[3] Article L.4141-2 du Code du travail
[4] CA Toulouse 22 mars 2019 n°17/04823 dans lequel la « car policy » avait, en l’espèce, fait l’objet d’une procédure d’information-consultation
[5] Articles L. 1321-5, L. 1321-1 du Code du travail
[6] Articles L. 1321-4 du Code du travail, R. 1321-1 du Code du travail
[7] Article R. 1321-2 du Code du travail